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Den drëtte Roman vun der Lëtzebuerger Schrëftstellerin Nelly Lecomte
Wéi schon an hirem leschte Roman "Au-delà des racines" interesséiert sech d'Nelly Lecomte och hei nees fir e ganz spezifesche Milieu. Haaptpersonnage ass de Jocelyn, jéngstent Kand vun enger Aarbechterfamill an der Géigend vu Léck. D'Nelly Lecomte resuméiert d'Handlung vun hierem Roman esou:
Nelly Lecomte:Jocelyn, le personnage principal d’Un verre entre frères, vit aux alentours de Seraing, un bourg ouvrier près de Liège, avec sa mère et ses frères-et-sœurs, une famille ouvrière qui s’étend sur plusieurs générations. Dernier-né, il est l’élément le plus malingre dans un milieu où on vit, voire survit, à la force de ses poignées. Le voilà au chômage ; délaissé alors par sa femme, il se met à vivre aux crochets de son frère aîné. Dans ce livre on suit l’évolution de cette famille, aussi diverse que nombreuse : Angélique, l’épouse de Jocelyn, qui, une fois enceinte, va revenir sur ses faux pas ; Marcel, le frère aîné, qui, trop porté sur la bouteille, n’est pas toujours le plus tendre ; Evelyne, une des sœurs, qui est mariée à un syndicaliste ; Agnès, la plus gentille des sœurs, qui va tomber dans le panneau d’un homme qui pourtant avait l’air de quelqu’un de bien ; Célestin, le frère le plus doué de la fratrie, qui va essayer de vivre de son talent naturel pour la technique jusqu’à devenir victime d’un sinistre. Puis, il y a Odile, la sœur cadette de la mère, qui se laisse aller à des relations ambiguës, et Odette, l’amoureuse de Célestin qui vient lui offrir son soutien. Tout ce livre sera traversé par leculte du travail, à la fois destructeur et principe de vie, voire de survie, ainsi que par cette relation d’amour et de haine entre le frère aîné et le frère cadet, initiée par l’amour maternel tout aussi ambigu.
Dans ce livre on suit l’évolution sur plusieurs générations d’une famille ouvrière, en région liégeoise. Des rapports malsains sont analysés entre les différents membres de cette famille, existant au sein de la fratrie, mais provenant aussi des générations antérieures, et axés principalement sur cette relation d’amour et de haine entre le frère aîné et le frère cadet.
Question: Tout comme dans votre dernier roman « Au-delà des racines » qui joue dans un milieu paysan, les protagonistes de « Un verre entre frères » vivent dans la précarité. Mais vous vous intéressez également aux relations familiales, parfois aussi toxiques que la précarité en soi ?
Nelly Lecomte:La précarité, la dureté de la vie influent sans aucun doute sur les relations entre les différents membres de la famille. Il y a la souffrance infligée par la nature du travail auquel sont réduits les différents membres de la famille, laquelle les pousse à se chercher un bouc-émissaire pour se défouler et survivre. Mais il y a aussi les normes et les valeurs sociales qu’on tente de respecter, liées également au mode de vie et à la nature des moyens de survie, le mimétisme social poussant les individus à imiter ceux qui sont socialement proches, copains, collègues de travail, et membres de la famille. Il y a l’éducation reçue par les enfants du même nid, le vécu des différents membres de la famille qui, pourtant, n’est pas forcément le même pour tous, ou pas ressenti de la même façon, il y a les rancunes suscitées par les inégalités de traitement subi par la fratrie, les désirs de vengeance, issus de sentiments d’injustices subies. Et aussi les rancunes et les haines qui sont transmises depuis des générations, et la reproduction sociale à laquelle aspire toute famille qui tente de transmettre mode de vie, valeurs et normes sociales, dont la reproduction est donc véhiculée à travers cette cellule fondamentale de toute société qu’est la famille.
Question: Est-ce que ces relations toxiques exercent aussi une influence sur les générations futures ? Comment s’en défaire ?
Nelly Lecomte:Pour se défaire de tels schémas de comportement, il faudrait commencer par une prise de conscience qui nécessite à la fois du recul et de l’intelligence. Dans la famille ouvrière de mon livre, certains membres essaient de se distancer de certains schémas de comportements, afin de s’émanciper, en s’éloignant géographiquement de leur famille d’origine, comme Agnès ou Célestin, mais ils reviennent toujours ou tentent de revenir. Car les origines sont là ; on ne peut pas les nier. Le lien familial est indéfectible, même si on essaie de vivre autrement, selon d’autres valeurs. En cas de malheur, on n’a qu’une seule et même famille pour se replier et chercher de l’aide et du réconfort. Mais, pour que le poison de ces relations toxiques disparaisse, il faut certainement beaucoup de temps et plusieurs générations, pour échapper à la transmission et au mimétisme, en d’autres termes à la reproduction sociale.
Hei och nach de Pressetext vun Le Lys Bleu éditions:
Dans une famille ouvrière, des relations toxiques émergent, prenant pour cible le dernier-né, plus vulnérable. Les liens malfaisants qui les unissent suscitent des interrogations au sujet de la rupture inéluctable entre les générations, pour l’émancipation et la réalisation de soi.
Un verre entre frères propose une réflexion centrée sur le rôle de la force physique comme clef de survie, dans un environnement fortement tributaire du travail manuel et soumis à des défis de subsistance.

© RTL/Bea Kneip
Nelly Lecomte
Nelly Lecomte est auteure de plusieurs œuvres publiées parmi lesquelles des recueils de poèmes, des contes et des essais. À travers ce troisième roman, Un verre entre frères, elle explore avec finesse les relations dysfonctionnelles au sein de la structure familiale et les tensions générationnelles qui en résultent.
"Un verre entre frères"
Nelly Lecomte
Le Lys Bleu éditions
120 pages
14€