Violence exercée contre les réfugiés à la frontière entre Bosnie et Croatie

An engem oppene Bréif vun den Ausseministère Jean Asselborn melle sech verschidden ONGen zur Wuert.
Monsieur le Ministre,
Avec consternation nous recevons, notamment lors des visites sur place des responsables de Catch a Smile, des rapports de personnes concernées au Nord de la Bosnie qui informent du traitement violent inacceptable à l’encontre de réfugiés et de migrants qui tentent le passage de la Bosnie vers la Croatie, donc l’entrée dans l’Union Européenne.
Indépendamment de la question de savoir si ce passage est illégal ou non, la législation internationale sur l’asile donne le droit à toute personne de demander protection et lui accorde le droit que cette demande soit analysée de façon impartiale.
Or les gardes frontières croates ne repoussent (« pushback ») pas seulement les réfugiés et les migrants vers la Bosnie, mais ils leur infligent délibérément des blessures et des humiliations qui sont destinées à les empêcher de tenter à nouveau le passage dans l’UE. Il est apparent que la Croatie agit de cette façon pour préparer son entrée dans l’espace Schengen, et d’ailleurs les responsables du reste de l’Union Européenne ne condamnent pas cette violence, au contraire des équipements de la police croate sont financés par d’autres pays de l’UE.
Dans leurs rapports les concernés racontent que:
- ils ont été frappés durement, voire on leur a brisé les articulations pour les empêcher de marcher ;
- il y a même eu des cas de décès suite à des blessures graves;
- ils ont été déshabillés à des températures bien en-dessous de 0 degrés, leurs vêtements ont été brûlés devant leurs yeux, on leur a demandé s’ils avaient froid et on leur a recommandé de se réchauffer au feu de leurs propres habits ;
- on leur a volé l’argent et leurs téléphones mobiles pour leur enlever toute possibilité de s’orienter et de se déplacer ;
- on leur a enlevé les souliers et on les a fait marcher sans souliers de longs kilomètres pour retourner en Bosnie.
Ces violences ont récemment fait l’objet d’un reportage sur RTL le 23 janvier 2020 et ont également été rapportées dans la presse écrite, p. ex. l’article de Deutsche Welle du 12 février 2020. Le « Border Violence Monitoring Network » mentionne des rapports similaires déjà depuis 2017 de plusieurs associations : UNHCR, Oxfam, Human Rights Watch, Amnesty International, Médecins sans Frontières, BalkanInsight, « Are you Syrious ». Aussi la « Tagesschau », surtout leur studio « Südosteuropa », documente et dénonce ces pratiques régulièrement. Au Parlement Européen des députés ont confronté d’ailleurs le premier ministre de la Croatie le 14.1.2020 avec ces violences, or les responsables croates ont démenti ces faits, comme « Pro Asyl » l’a documenté le lendemain.
Il y a lieu de noter par ailleurs que plusieurs ONG sont actives de part et d’autre de cette frontière pour alléger quelque peu le sort des réfugiés et des migrants, Catch a Smile s’y rend régulièrement et est en contact avec les organisations actives en permanence, et, parmi plusieurs autres, le JRS (Jesuit Refugee Service) - Croatie et - Bosnie y intervient continuellement.
Monsieur le Ministre, il nous paraît inconcevable qu’un traitement aussi atroce puisse avoir lieu à une frontière de l’Union Européenne au 21ème siècle, et ce de façon continue et systématique de la part de forces publiques d’un Etat membre de l’UE, qui assure par ailleurs pour l’instant la présidence de l’UE. Nous vous demandons d’intervenir aux niveaux compétents de l’UE pour que celle-ci prenne les mesures nécessaires et appropriées en interne et vis-à-vis de la Croatie afin que cette pratique indigne prenne fin dans les meilleurs délais. Notamment nous proposons que vous mettiez ce point sur l’ordre du jour du prochain Conseil des Ministres JAI (Justice et affaires intérieures).
Avec nos salutations respectueuses et nos remerciements anticipés.