Au Sud, c’étaient les co-lonies
la terre le minerai de fer
les hommes des « galériens » du fond
notre horizon 
le ciel cramoisi
nos fenêtres donnaient
sur le terrain de jeu râpé
de notre Jeunesse aimée
et des lucarnes toutes semblables
les flocons de neige mouillée
saupoudraient mon cartable
et mon père en rentrant 
avait les yeux si bruns
que je croyais le voir en train 
de venir de loin 
j’apprenais mes lessons     ( cédille manquante… !)
sur la toile cirée
la joue contre son bras
je crois qu’il était fier de moi
il était généreux
comme ceux de ce coin
de sa nouvelle Italie
et je lui dois ce que je suis
et c’était mon enfance 
et elle était heureuse
dans les jupes de ma mère
et la buée des dernières lessiveuses
j’avais des collines rousses 
et des crassiers gris
de la sidérurgie
à défaut de montagnes 
d’en haut je voyais 
au-delà de Terre Rouge
mon Esch préféré
et par beau temps jusqu’á Arlon
mon père était gueule jaune
comme le furent ses parents
ma mère, elle
avait les cheveux blonds
on était du «  Minett »
comme on est d’un terroir
grâce à eux
je sais qui nous sommes
Belval usine 
ce fut bien avant l’heure
en reprenant la chanson
notre seule « université » 
y avait à la mairie
le premier mai 
discours et
jour d’allégresse
dans le cortège des drapeaux
une photo 
et encore de nos jours
une rue Jean Jaurès
chaque gorgée de Picon Bière
comme antidothe à la silicose
et l’injustice
bien moins amer que
les fermetures et la sinistrose
en dépit des réserves 
le tonnage et la production
Ste Barbe était leur patronne
et ils la vénéraient
contrairement aux patrons
ils parlaient de 42
et de la descente des nazis
dans les boyaux du carreau 
évoquée dans un bouquin 
par la fille Filipetti
des effondrement et accidents
au fond du trou
des grèves et revendications
se remémorant en remontant
le temps 
le camarade Bausch
le  député-mineur
mort à la mine
et un des leurs 
le père Schortgen
même combat
même destin
leurs tout  premiers défenseurs